L'Illustration, No. 3272, 11 Novembre 1905



(Agrandissement)



Ce numéro contient quatre pages sur papier de luxe, non brochées, etdeux suppléments:
Une gravure en couleurs;
Supplément musical: fragments de MIARKA.



La princesse Maud et le prince Charles de Danemark.
LEPLÉBISCITE DU 12 NOVEMBRE EN NORVEGE: LE ROI ET LA REINE DE DEMAIN
Phot. W. et D. Downey.--Voir l'article, page 307.



COURRIER DE PARIS

Journal d'une étrangère

J'ai fait, cette semaine, un repas singulier. Nous étions cinquantemille. C'était la première fois qu'il m'arrivait de rencontrer à tabletant de visages inconnus. Déjeuner fort honorable au surplus: menu demets froids, proprement alignés le long de mille nappes blanches etconsommés dans la poussière et le tapage, parmi le bruissement aigu decinquante mille assiettes remuées. Je ne soupçonnais pas que la galeriedes Machines pût si commodément servir de salle à manger à la populationd'une grande ville; et je n'oublierai jamais la pittoresque et presqueémouvante étrangeté de la double procession qui, sous un ciel pluvieux,nous conduisit là. Deux cortèges: deux vivants rubans de foule déployés,des Tuileries au Champ de Mars, de chaque côté du fleuve; puisrapprochés, ramenés par une marche savante autour de l'étroite loggia detoile grise d'où nous envoyait le bonjour, en riant, un petit homme àbarbe blanche. «Vive Loubet!» L'armée des Mutualistes avançaitdoucement; un tumulte de musiques et de cris l'enveloppait. Et, denouveau, l'on vit les deux rubans se disjoindre, filer en deux lignesparallèles, à travers la boue, vers l'énorme bâtisse de fer et s'yengouffrer--comme happés par les deux mâchoires de quelque engrenagemonstrueux.

C'est par un journal parisien que fut organisée cette agape folle etc'est à l'initiative d'un autre journal que les cinquante mille convivesdu premier durent de voir s'ouvrir gratis, pendant cet après-midi dedimanche, à leur joyeuse cohue, une demi-douzaine de concerts et dethéâtres du boulevard.

La furieuse concurrence que se font ici quelques gazettes a donnénaissance à un journalisme nouveau, d'une espèce très particulière, etqui ne ressemble en rien à celui d'autrefois. La politique pure y tientpeu de place; la littérature et les arts, moins encore; et tellefeuille n'a dû sa grande vogue qu'au parti pris d'intervenir (utilementquelquefois) en toutes sortes d'affaires qui ne la regardaient point.Tous les matins, j'ouvre avec une curiosité gourmande le journal qu'onm'apporte et je pense: «Qu'ont-ils trouvé d'amusant aujourd'hui?» Jesuis rarement déçue; mon journal a presque tous les matins «trouvéquelque chose». Il institue des concours sportifs, athlétiques oulittéraires; il donne des fêtes, il lance des bateaux, patronne desascensions, me fait à chaque instant de petits cadeaux que je ne luidemande pas; même il ne lui déplaît point de suppléer de temps entemps, par sa propre action, à l'indolence de l'action publique; ils'arme de pioches pour démolir une palissade que l'État n'abat pointassez vite et, si je me plains à lui que les bureaux de poste de monquartier soient malpr

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