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Gustave Aimard — Jules Berlioz d'Auriac
JIM LINDIEN(1867)
Table des matières
Par une brûlante journée du mois daoût 1862 un petit steamersillonnait paisiblement les eaux brunes du Minnesota. On pouvaitvoir entassés pêle-mêle sur le pont, hommes, femmes, enfants,caisses, malles, paquets, et les mille inutilités indispensablesà lémigrant, au voyageur.
Les bordages du paquebot étaient couronnés dune galerie mouvantede têtes agitées, qui toutes se penchaient curieusement pourmieux voir la contrée nouvelle quon allait traverser.
Dans cette foule aventureuse il y avait les types les plusvariées: le spéculateur froid et calculateur dont les yeuxbrillaient dadmiration lorsquils rencontraient la grasseprairie au riche aspect, et les splendides forêts bordant lefleuve; le Français vif et animé; lAnglais au visage solennel;le pensif et flegmatique Allemand; lécossais à la mine résolue,aux vêtements bariolés de jaune; lAfricain à peau débène. —Une marchandise de contrebande, comme on dit maintenant. — Tousles éléments dun monde miniature sagitaient dans létroitnavire, et avec eux, passions, projets, haines, amours, vice,vertus.
Sur lavant se tenaient deux individus paraissant toutparticulièrement sensibles aux beautés du glorieux paysagedéployé sous leurs yeux.
Le premier était un jeune homme de haute taille dont les regardsexprimaient une incommensurable confiance en lui-même. Un largePanama ombrageait coquettement sa tête; un foulard blanc,suspendu avec une savante négligence derrière le chapeau pourabriter le cou contre les ardeurs du soleil, ondulaitmoelleusement au gré du zéphyr; une orgueilleuse chaîne dorchargée de breloques sétalait, fulgurante, sur son gilet; sesmains, gantées finement, étaient plongées dans les poches dunléger et adorable paletot en coutil blanc comme la neige.
Il portait sous le bras droit un assez gros portefeuille remplidesquisses artistiques et Croquis exécutés daprès nature, auvol de la vapeur.
Ce beau jeune homme, si aristocratique, se nommait M. AdolphusHalleck, dessinateur paysagiste, qui remontait le Minnesota dansle but denrichir sa collection de vues pittoresques.
Les glorieux travaux de Bierstadt sur les paysages et les moeursdes Montagnes Rocheuses avait rempli démulation le jeunepeintre; il brillait du désir de visiter, dobserver avec soinles hautes terres de lOuest, et de recueillir une ample moissondétudes sur les nobles montagnes, les plaines majestueuses, leslacs, les cataractes, les fleuves, les chasses, les tribussauvages de ces territoires fantastiques.
Il était beau garçon; son visage un peu pâle, coloré sur lesjoues, dun ovale distingué annonçait une complexion délicatemais aristocratique, On naurait pu le considérer comme ungandin, cependant il affichait de grandes prétentions àlélégance, et possédait a