RENÉ BOYLESVE

SAINTE-MARIE-DES-FLEURS

ROMAN

PARIS

PAUL OLLENDORFF, ÉDITEUR

28 bis, RUE DE RICHELIEU, 28 bis

1897

Tous droits de traduction et de reproduction réservés pour tous lespays, y compris la Suède et la Norvège.

S'adresser pour traiter, à M. PAUL OLLENDORFF, éditeur, 28 bis, rue deRichelieu, Paris.

IL A ÉTÉ TIRÉ A PART

DIX EXEMPLAIRES SUR PAPIER DE HOLLANDE

NUMÉROTÉS A LA PRESSE


A MAURICE BARRÈS

En témoignage du profond plaisir que j'ai eu à connaître sa bellesensibilité.

R. B.


I,II,III,IV,V,VI,VII

Il faut avertir le lecteur que c'est ici un livre où le cœur se donne,franchement, absolument.

Que ceux qui n'apprécient les romans contemporains que dans la mesure oùils contiennent ce que l'on est convenu d'appeler la «rosserie» ou la«veulerie» parisiennes, s'abstiennent de feuilleter plus loin.

Grâce à Dieu, il y a encore, à côté ou au-dessous même de ces mœurs depolichinelles—plus à la mode, d'ailleurs, que réelles,—une aptitudefrançaise à sentir, à aimer, à jouir et à souffrir en hommes.

Cette heureuse disposition n'est pas si banale! Rassurons les délicatsqui pourraient craindre qu'en s'en inspirant l'écrivain se condamnât àla peinture de la vie commune ou médiocre.

Ce n'est pas en feignant de n'être plus des hommes, que l'on sesingularise et s'élève, mais en accentuant en soi le caractèred'humanité. Seule, l'excessive passion a la vertu de nous rendreexceptionnels sans nous ridiculiser; elle fait de nous des héros, nondes monstres. Les créations romanesques peuvent se passer de la marquede généralité qui est le propre de certains types moyens, pourvuqu'elles restent scrupuleusement soumises à la marque de vérité quifait le Roman.

R. B.


«Je t'aime tant aujourd'hui, je suis tellement dévoué que j'aibesoin de l'écrire, ne pouvant le dire à personne...»

STENDAHL.

«Je me fais quelquefois un rêve d'Élysée; chacun de nous varejoindre son groupe chéri auquel il se rattache, et retrouver ceuxà qui il ressemble: mon groupe à moi, mon groupe secret est celuide ceux qui sont tristes, mystérieux et rêveurs jusqu'au sein duplaisir, et pâles à jamais sous une volupté attendrie.»

SAINTE-BEUVE.

«Hertzblut ist dabei.» (Le sang du cœur est là.)

Lettres de SCHUMANN.


I

Ce fut sur la plage du Lido, à Venise, que je rencontrai pour latroisième fois la jeune fille que le destin, évidemment, s'entêtait àplacer sous mes pas. Elle avait fait une vive impression sur moi,quelques semaines auparavant, à Florence, devant la porte de l'égliseSainte-Marie-des-Fleurs, où je l'avais entendue envoyer promener d'unevoix nette et décidée les guides innombrables qui importunent lesétrangers de leurs bons offices. Elle leur avait jeté un«allez-vous-en!» si impatienté et si colère que je n'avais pu m'empêcherde sourire, en passant près d'elle à ce moment. Elle s'en était aperçueet avait rougi. Je

...

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