LE LIVRE DU BOUDOIR
MÉMOIRES
DE L'ABBÉ
DE CHOISY
HABILLÉ EN FEMME
Avec Notice et Bibliographie
Par le Chevalier de PERCEFLEUR
Membre Correspondant de l'Académie des Dames
SE VEND A PARIS
A la Bibliothèque des Curieux
4, RUE DE FURSTENBERG, 4
(Derrière l'Abbaye St-Germain-des-Prés)
1920
MÉMOIRES DE L'ABBÉ DE CHOISY
«Choisi n'est icy qu'ébauché:
Sa vie on devrait bien écrire,
Mais jamais on ne pourra dire
S'il fut plus fou que débauché [1]»
François-Timoléon de Choisy naquit à Parisle 16 août 1644. Son père était intendant duLanguedoc quand il fut chargé d'arrêter àMontpellier M. de Cinq-Mars et de se saisir deses papiers. Il le trouva occupé à en brûler unegrande partie: les lettres de la princesse Marie 2et de Mme de Choisy, leur confidente, et il eutla complaisance de le laisser faire. «Vous avezraison, Monsieur, dit Cinq-Mars, vous seriezbien fâché de trouver ce que je viens de brûler...»Ce Choisy dut aux intrigues de sa femme dedevenir Conseiller d'État, puis Chancelier deMonsieur, duc d'Orléans et frère de Louis XIII.Mme de Choisy [2] était fille aînée de M. deBelesbat, de la maison de Hurault, et petite-filledu Chancelier de l'Hospital. Elle avait eudéjà trois fils, quand, à plus de cinquante ans,étant toujours belle et coquette, elle s'avisa d'enfaire un quatrième. Elle pensait ainsi prolongerde deux lustres l'apparence de sa jeunesse. Ellejoignait à la beauté, à l'ambition, à l'intrigue età la coquetterie, un esprit sans lequel ces grâceset ces aspirations ne leur eussent servi que depeu. Car cet esprit plut tant à Louis XIV qu'illui donnait deux audiences par semaine, et qu'illa pourvut d'une pension de 8.000 livres afinde se conserver les charmes de sa conversation,et dans l'espoir de devenir «honnête homme» 3à son commerce, comme elle le lui avait fait accroireaprès avoir gagné la confiance d'Anned'Autriche. En outre, elle correspondait avecMarie de Gonzague, reine de Pologne, MadameRoyale de Savoie, Christine de Suède et plusieursprincesses d'Allemagne. Par un effet dela politique pitoyable de Mazarin, l'on élevaitMons