La France offre à la Pologne, en gage d’une amitiéplus forte que le destin, le portrait religieusementfidèle d’un homme cher à toutes deux, d’un deshommes les meilleurs qui aient honoré la naturehumaine.
D’autres furent aussi vaillants, d’autres plus grandspeut-être ou plus exempts de faiblesses. Kosciuszkofut, entre tous, éminemment bon.
C’est le dernier des chevaliers,—c’est le premierdes citoyens (dans l’Orient de l’Europe). Le drapeausi haut porté de l’ancienne chevalerie polonaise, sagénérosité sans bornes ni mesure, et par delà laraison; un cœur net comme l’acier! et avec celaune âme tendre, trop tendre parfois et crédule; unedouceur, une facilité d’enfant,—voilà tout Kosciuszko.—Unhéros, un saint, un simple.
Plusieurs, et des Polonais même, dans leur austéritérépublicaine, d’un point de vue tout romain, ontjugé sévèrement ce héros du cœur et de la nature.Ils n’ont pas trouvé en lui le grand homme et lepolitique que demandait la situation terrible où ladestinée le plaça. Appelé à la défense d’une causedésespérée, à la lutte la plus inégale, il accepta,crut au miracle, et, comme un chevalier, un saint,embrassa magnanimement les deux chances, victoireou martyre. Mais, quant aux moyens violents quipouvaient donner la victoire, il ne fallait pas luidemander d’y avoir recours. Il ne prit pas l’âme debronze qu’exigeait un tel péril. Il ne se souvintpas, disent-ils, qu’il était dictateur de Pologne, qu’ildevait forcer la Pologne à se sauver elle-même,terrifier la trahison, l’égoïsme, l’aristocratie. Il sedonna, ce fut tout, demanda trop peu aux autres, secontentant de mourir, les laissant à leurs remordset s’enveloppant de sa sainteté.
Noble tort d’un cœur trop humain!... Ah! nousaurions plus d’un reproche à faire à Kosciuszko, pourla douceur et la tendresse. Il était confiant, crédule,se laissait prendre aisément aux paroles des femmeset des rois. Un peu chimérique, peut-être d’une âme