L'Illustration, No. 3277, 16 Décembre 1905


(Agrandissement)

Ce numéro contient: une double page en couleurs sur le 8e Salon del'automobile; Et en suppléments:
Une gravure hors texte: la Cruche cassée, d'aprèsJ.-B. Greuze;
2º Le 4e fascicule du roman de J.-H. Rosny: la Toison d'or.


Le Dr Récamier Le duc d'Orléans. UNE CHASSE A L'OURSBLANC AU GROENLAND Photographie prise au cours de l'expédition arctiquedu duc d'Orléans à bord de la Belgica.--Voir l'article, page 403.


COURRIER DE PARIS

Journal d'une étrangère

Je ne connais pas M. le député Ribot. Mais je voudrais le connaître pourlui dire à quel point je suis contente de lui et combien j'admire soncourage. Un journal raconte, en effet, qu'élu naguère membre del'Académie des sciences morales et politiques, M. Ribot a volontairementnégligé de commander à son tailleur l'uniforme fameux dont l'imageliante les rêves ingénus de tant de vieillards. L'habit à palmes vertesne tente point la coquetterie de M. Ribot; M. Ribot n'éprouve le besoinni de suspendre à sa ceinture --pour prouver qu'il est un orateur detalent--une lame pointue, ni de poser sur sa tête ce chapeau bicornedont une mode singulière veut qu'en France, à l'exemple des généraux,les garçons de recette et les académiciens soient coiffés. Et il oseavouer à ses amis la répugnance que cette tradition «de se déguiser» luiinspire! On élira bientôt M. Ribot membre de l'Académie française; cettefois, il lui faudra, bon gré mal gré, se déguiser; car l'Académiefrançaise ne plaisante point en ces matières et, chez elle, l'uniformeest resté de rigueur. Et M. Ribot ne dissimule point que cette coiffureemplumée, cette épée, ces feuillages brodés au plastron de l'habit et àla couture du pantalon lui gâtent par avance une partie de sa joie.

M. Ribot se consolera en pensant que les plus prestigieuses modes n'ontqu'un temps et que celle des déguisements académiques passera, comme lesautres. On m'assure même que l'âme française s'est, à cet égard, depuisquelques années, démocratisée un peu. Il paraît que plusieursacadémiciens ont pris l'habitude de porter, sous le gilet officiel àboutons d'or, le simple pantalon noir, et qu'à la Sorbonne il existe unvestiaire commun où les mêmes robes et les mêmes épitoges servent àplusieurs maîtres qui, suivant les besoins du service, se lesrepassent... Les professeurs ont, dans les lycées, renoncé depuislongtemps au port de la toque noire et de la toge; on a cessé d'orner,comme autrefois, les manches de tunique des bons élèves de galons delaine et d'or; au Palais même les règles de l'ancienne étiquettes'abolissent petit à petit: on a vu M. le bâtonnier Chenu, l'étédernier, s'y promener en bottines fauves et «canotier» de paille, et desgilets de fantaisie égayer de leur coloriage l'uniforme des juges. C'estune révolution, cela! Elle s'accomplit tout doucement, sans doute; maisM. Ribot n'est pas très vieux. Il a encore le temps de voir tomber endésuétude bien des modes niaises et, peut-être, qui sait? disparaîtredes bancs de l'Institut cet habit vert et ce chapeau à plumes souslesquels on a vu tant d'hommes vénérables apparaître un peu comiques...

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