COLONNA DE CESARI ROCCA
VENGEANCES
CORSES
Collection A.-L. GUYOT, 51, Rue Monsieur-le-Prince PARIS.
20 Centimes — Algérie, Colonies et Étranger : 25 Centimes (Port en plus)
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DE LA
Collection A.-L. GUYOT
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CHRONIQUES ET RÉCITS
RECUEILLIS PAR
Colonna de Cesari Rocca
PARIS
Collection A.-L. GUYOT
51, rue Monsieur-le-Prince, 51
TOUS DROITS RÉSERVÉS
VENGEANCES CORSES
« Prima lex est ulcisci — La première loidu Corse est de se venger », dit un vieux distiqueanonyme attribué à Sénèque probablementà tort, mais en tous cas fort ancien. UnCorse du moyen âge auquel on ne saurait reprocherde ne pas aimer sa patrie dont il futplus l’apologiste que l’historien (Petrus Cyrnæus)écrivait :
« Les Corses aiment les factions et ont soifde victoires ; avides de vengeance, s’ils ne peuventl’obtenir ouvertement, ils emploient desembûches, la ruse et tous les modes d’artificespour atteindre leur but. »
« Qu’il soit vivant, qu’il soit mort, redoutele Corse qui n’a pas satisfait sa vengeance »,dit un proverbe italien du XVIIe siècle.
Et Stendhal :
« Ils ne songent qu’à deux choses : se vengerde leur ennemi et aimer leur maîtresse. »
Ces quatre jugements portés en des sièclesbien différents sur la caractéristique essentielledes mœurs corses serviront d’épigraphesaux pages qui vont suivre.
La tendance de l’homme à se faire justicesoi-même est instinctive. Par loi de nature ilécarte ou détruit tout obstacle à sa conservationou à son bien-être. Si un accident lui arrive, siun malheur le frappe, les causes de cet accident,de ce malheur lui seront toujours un souvenirpénible, même si ces causes sont d’ordrematériel. Mais quand la catastrophe dont il aété victime a pour auteur un être conscient qui,volontairement, a provoqué sa douleur ou sonmécontentement, qui, ensuite, a tiré de son succèsune satisfaction outrageante pour lui,l’homme veut à son tour la satisfaction adéquatequi ne se peut obtenir que par une souffranceégale ou supérieure chez celui qui l’aoffensé. Quand la société préside à cet acte decompensation, c’est la justice ; sinon c’est lavengeance.
Mais il est rare qu’un équilibre absolu soitétabli entre le crime et la sanction exercée parla justice individuelle, c’est-à-dire par la vengeance.Celle-ci, d’ailleurs, eût-elle strictementobservé la loi du talion « dent pour dent, œilpour œil », il est certain que celui qui estfrappé par cet