CROQUIS
D'EXTRÊME-ORIENT
– 1898 –
PARIS
SOCIÉTÉ DES TRENTE
ALBERT MESSEIN, ÉDITEUR
19, quai saint-michel, 19
1921
DU MÊME AUTEUR
ROMANS ET CONTES:
Fumée d'opium, contes.
Les Civilisés, roman.
L'Homme qui assassina, roman.
Mademoiselle Dax, jeune fille, roman.
La Bataille, roman.
Les Petites Alliées, roman.
La Maison des hommes vivants, roman.
Thomas l'Agnelet, roman.
Dix-sept histoires de marins, contes.
Quatorze histoires de soldats, contes.
La Dernière Déesse, roman.
Bêtes et Gens qui s'aimèrent, contes.
Les Condamnés à mort, roman.
THÉÂTRE:
La Veille d'armes.
La Vieille histoire, comédie.
Roxelane, tragédie.
EN PRÉPARATION:
Les Hommes nouveaux, roman.
Le Dernier Dieu, roman.
[Pg 6]IL A ÉTÉ TIRÉ DE CE LIVRE:
40 exemplaires sur papier du Japon Impérialet 500 exemplaires sur papier vergé d'Archestous numérotés.
L'année 1898 ne fut pas pour nous de cellesdont on garde un bon souvenir. L'affaire Dreyfusavait divisé la France. L'armée en restaitdouloureuse, et notre prestige au dehors amoindri.Nos rivaux profitaient de ce désarroi. L'Angleterreet l'Allemagne se disputaient les dépouillesde notre influence ruinée. Un gouvernementfaible et têtu ne résistait pas. L'histoireuniverselle se déroulait sans nous. On attaquaitbrutalement l'Espagne. On rêvait de conquérir laChine. On nous infligeait l'affront de Fashoda.Dans nos colonies, nous perdions peu à peutous nos droits. Où nous arrêterions-nous? LeXIXe siècle, ouvert par notre gloire, semblaitprêt à se fermer sur notre agonie.
[Pg 8]A l'intérieur, la lutte des partis aveuglait lesmeilleurs citoyens. Il fallait s'éloigner pourprendre conscience du péril qui nous menaçait.De l'étranger, un Français mesurait mieux leserreurs de la France. Nos marins surtout ensouffrirent cruellement. A chaque endroit dumonde où le service les portait, ils ne se sentaientplus les soldats d'un pays respecté. Le désir dese dévouer davantage, et sans espoir peut-être,s'exaltait en eux. La génération se préparait qui,vingt ans plus tard, courrait au sacrifice. Mêmeen 1921, la France ne sait pas assez ce qu'elledoit à ses marins.
Or, aux premiers jours de 1898, un jeune officierde marine se trouvait en Extrême-Orient.Depuis quelques mois, supportant mal de ne pasdire haut ce qu'il jugeait nécessaire de dire, ilécrivait, pour un journal de Lyon, le SalutPublic, des articles d'une ardeur et d'une intelligencequ'on apprécia. Dès le 29 septembre 1897il avait dénoncé les intentions coupables desEtats-Unis d'Amérique contre l'Espagne. Puis,navré de l'ignorance dangereuse où l'on étaitchez nous des choses de la mer, il avait parléaux lecteurs du Salut Public, comme on ne le[Pg 9]faisait pas à ceux des journaux parisiens, deGuilla