J.-H. AUBRY
Ouvrage illustré de 60 gravures
d’après des photographies et des documents inédits
PARIS
F. JUVEN, ÉDITEUR
122, RUE RÉAUMUR, 122
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TABLE |
Jolie fleur de mai.—Sur les fonds d’or de la Tour de Londres.—Niun nom ni l’autre, Victoria.—Claremont.—L’orpheline deSydmouth.—La Cour de poupées de la princesse Drina.—Poupéesvivantes.—150.000 francs à dépenser par an à six ans.—Rayons etombres.—L’écolière.—Un instrument de torture sous clé.—Fini derire.—Bal d’enfants à la Cour.—Le Tourd’Angleterre.—Confirmation.—Petite marraine d’un grandport.—Majeure.—Le sommeil d’une reine appartient à l’État.—Lareine et son premier ministre.—Premier conseil privé.—Dans lacour de Saint-James Palace.—Les ancêtres de la reine.
C’est au palais de Kensington, qui a donné son nom au quartier le plusselect de Londres, désigné aujourd’hui sous le nom de West-End, que laduchesse de Kent, née princesse Louise-Victoria de Saxe-Cobourg, donnale jour à une fille, le 24 mai 1819.
Le duc de Kent, le père, quatrième et dernier fils de Georges III,prévoyant sans doute que ses frères mourraient sans postérité et que letrône reviendrait à son enfant, avait tenu à ramener sa femmed’Allemagne, où ils{2} pouvaient vivre plus modestement sans trop faire dedettes, afin que l’héritière présomptive de la couronne deGrande-Bretagne et d’Irlande naquît en territoire britannique.
Le père de la future reine était un bon grand diable, aux idéeslibérales, presque frondeur, tenu à distance par la Cour et suspect àl’aristocratie qui lui avait bien fait sentir son mécontentement en luirognant le plus possible de sa liste civile. Pour toutes ces raisons, iljouissait de la plus grande popularité. Il supportait d’ailleursallégrement sa disgrâce et paraît à l’insuffisance de ses revenus, enfaisant attendre ses fournisseurs, si bien qu’il légua à sa fille enhéritage une dette assez rondelette que celle-ci s’empressa d’ailleursde payer, en fille pieuse, sur sa liste civile. Sa mère, mariée ensecondes noces au duc de Kent, avait été très malheureuse avec le duc deSaxe-Meiningen, son premier mari.
La jeune princesse vint donc au monde dans le mois des roses, ce qui lafit appeler par son père sa «jolie fleur de mai» et à quatre heures etdemie du matin, circonstance qui devait permettre à la reine de répondreà ses courtisans, surpris de ses habitudes matinales, qu’elle avait prisl’habitude de se lever de bonne heure dès son premier jour.
Le palais de Kensington, qui date du XVIe siècle, est sévère ettriste d’aspect. Il n’est devenu propriété royale qu’en 1690, sousGuillaume III, qui l’acheta de Lord Nottingham. Les reines Marie II etAnne et les rois Geo