L'ILLUSTRATION
Prix du Numéro: 75 cent.
SAMEDI 18 AVRIL 1891
49e Année.--N° 2512
M. ÉMILE PALAZOT Survivant de la caravane massacrée
auSénégal.--Phot. Chalot.
M. ÉDOUARD PAPILLON.--Phot. Chalot. M. ADOLPHE VOITURET.--Phot. Blanc.
lus de Chambres, pas de grand procès à la mode, aucun gros scandale,aucune première sensationnelle: rien. Le calme. Mauvaises semaines pourles chroniqueurs. Ce qu'il leur faut, c'est le tapage, les mortsillustres, les drames nouveaux. Mais, pour le moment, ils doiventrenoncer à tout cela. Il n'y a rien. La mode même ne saurait fournirmatière à causerie: elle est indécise comme le temps présent. Ce n'estplus l'hiver, ce n'est pas le printemps.
Je sais bien que le 1er mai approche. Le 1er mai! Le grand Longchampsdes travailleurs, le jour du chômage immense, la fête internationale dela Sainte-Flême. Il approche, le 1er mai, et nous n'avons pas l'air denous en douter.
C'est que, pareille à la manifestation de l'an dernier, la manifestationde cette année ne semble pas devoir être bien dramatique. On sepromènera, on mettra sur pied des milliers de soldats, et chacunrentrera chez soi, ceux-ci dans la caserne, ceux-là dans le logis où ily aura une journée de salaire de moins. Et si vous voyez, le 1er mai,des braves gens flâner, traîner leurs souliers le long des maisons, lesmains dans les poches, vous pourrez dire:
--Voilà des travailleurs!
On les reconnaîtra, ce jour-là, à ce signe: ils ne feront rien.
Ils ne feront rien de mal, voilà le certain, et, malgré les gros yeuxroulés par certains monteurs de têtes, il ne sera pas nécessaire demobiliser l'armée de Paris. On conjuguera le verbe manifester:
Je manifeste,
Tu manifestes,
Il manifeste,
Nous manifestons,
Vous manifestez...
C'est un plaisir comme un autre et une façon d'inaugurer le mois de mai.
Joli mois de mai, quand reviendras-tu?
Que je manifeste et n'sois pas battu!
Il reviendra, et bientôt, et les Chambres avec lui et la vie politiqueet les chasses au portefeuille et les discussions interminables. Enattendant, Paris a, pour se divertir, l'exposition de Poil et Plumechez M. Bodinier. Poil, c'est le pinceau, plume, c'est la plume dulittérateur, le tout se mêlant pour attirer la curiosité publique. Jevous en parlais l'autre jour. Et je dois constater maintenant quel'exhibition a réussi.
Yvette Guilbert continue, elle aussi, à attirer la foule à laBodinière. Il paraît que M. Duquesnel a voulu engager la chanteuse àla mode pour jouer le Petit Faust à la Porte Saint-Martin. YvetteGuilbert a refusé. Elle est reine dans son domaine, et elle s'y tient.
Étrange fille, décidément, une artiste rare, un type très particulier,tout à fait moderne. Une diseuse exquise, pro