G. REVAL
DIX-SEPTIÈME ÉDITION
PARIS
SOCIÉTÉ D’ÉDITIONS LITTÉRAIRES ET ARTISTIQUES
Librairie Paul Ollendorff
50, CHAUSSÉE D’ANTIN, 50
1907
Tous droits réservés.
DU MÊME AUTEUR
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S’adresser, pour traiter, à la librairie Paul Ollendorff,50, Chaussée d’Antin, Paris.
SAINT-DENIS. — IMP. H. BOUILLANT, 20, RUE DE PARIS. — 16811.
A Madame Marni.
Madame,
Le vieil usage n’est-il pas qu’un auteur, avantd’abandonner son livre aux caprices du Destin, levoue à quelque Génie bienfaisant ?
Faites-moi la grâce, Madame, d’accepter l’hommagede mon premier livre : vous êtes ce bonGénie, et c’est d’un cœur tout à vous, que je vousoffre, en témoignage d’admiration et de gratitude,les pages qui vous ont plu.
Vous m’êtes témoin, Madame, qu’en écrivantun livre sur l’École de Sèvres, je n’ai fait autrechose que grouper mes souvenirs de Sèvrienne,initiant ainsi le public, qui nous ignore, à une vied’ardent et pénible labeur, à des émotions âpresou puériles. Je l’ai fait sincèrement, même en cequi touche quelques sujets délicats.
Ce n’est point une œuvre pédagogique quej’entreprends, et ce n’est pas une satire de la trèshaute culture que reçoivent à Sèvres les privilégiéesde nos lycées de jeunes filles. Je ne suis pasassez l’ennemie de moi-même, pour déchirer lesein qui m’a si copieusement nourrie.
Mon dessein a été de peindre, par des tableauxsuccessifs, et par le récit d’une courte aventure,un milieu très spécial, « select » et très fermé,par la difficulté grandissante du concours deSèvres.
Sèvres n’est pas un couvent, et n’est pas davantageune Université féminine. Ni nonnes, niétudiantes, les Sèvriennes, au nombre de soixante,vivent là comme en un gynécée libéral, dont lesportes s’ouvrent avec confiance, avec amour, devantla Poésie, l’Art, la Science. Il est facile, enfeuilletant les cours des Littéraires et des Scientifiques,de se rendre compte de l’œuvre poursuiviepar nos Maîtres. Sèvres est le cerveau de ce grandenfant barbare, imprudent, mais tenace, qu’estl’Enseignement secondaire des jeunes filles.
Ce qu’il est plus difficile de juger, c’est lecharme de cette vie solitaire et studieuse, c’est latransformation de ces êtres inachevés, dans l’aubedéjà resplendissante de la pensée qui s’éveille,c’est ce moment extraordinaire, où soudain l’espritatteint sa puberté, moment d’orgueil immense,où la jeune fille se croit assez forte pour marcherseule dans la vie.
Alors, c’est une rupture complète avec le passé :elle entre à Sèvres ; d’où vient-elle ? peu importe,rien ne va subsister de ce qu’elle apporte en patrimoine.Elle est le sol déjà remué par la charrue,mais non ensemencé. Voilà le semeur qui passe,jetant aux sillons la graine, et sur le germefécond, pieusement la Vierge referme les lèvres,mystiques gardiennes de la moisson. Le Sacerdocecommence.
Pour donner corps à ma pensée, j’ai choisi ungroupe de Sèvriennes très différentes par tempéramentles unes des autres, n’ayant de communentre elles, que le travail, les habitudes, le but àatteindre.
Je n’ai point indiqué, ou très peu, ce qu’ellesétaient avant d’entrer