LE FRANÇAIS
TEL QUE LE PARLENT
NOS TIRAILLEURS SÉNÉGALAIS

PARIS
IMPRIMERIE-LIBRAIRIE MILITAIRE UNIVERSELLE
L. FOURNIER
264, Boulevard Saint-Germain, 264
(En face le Ministère de la Guerre)

1916

Préliminaires

De même que dans l'Afrique du Nord le contactdes Arabes avec les Français, les Italiens etles Espagnols a engendré une langue spéciale, lesabir, dont la littérature humoristique ne manquepas de saveur, de même nos tirailleurs noirs aucontact de leurs instructeurs européens ont crééun langage que l'on a appelé le «petit nègre», etqui, bien que parlé par des indigènes d'origineset de dialectes différents (Bambaras, Ouoloffs,Dahoméens, etc.), semble avoir obéi pour sa formationà des règles fixes.

Nous allons essayer de dégager ces règles; leurconnaissance facilitera la tache des nombreuxgradés européens versés dans les troupes noires,leur permettra de se faire comprendre en peu detemps de leurs hommes, de donner à leurs théoriesune forme intelligible pour tous et d'intensifierainsi la marche de l'instruction.

Pour obtenir de bons résultats en cette matière,il ne faudra jamais perdre de vue les deuxrègles suivantes:

1o Désigner toujours le même objet ou exprimerla même idée par le même mot;

2o Donner toujours à la phrase française laforme très simple qu'a la phrase dans tous lesdialectes primitifs de notre Afrique Occidentale.

Le premier point fera l'objet d'une étude spéciale.

Prenant successivement dans les règlementsmilitaires quelques-uns des passages dont la connaissanceest nécessaire au soldat, nous les traduironsen «langage tirailleur»; nous indiqueronsles mots et expressions que l'usage a consacrésà cause de leur facilité de prononciation etqu'il serait avantageux d'adopter définitivementà l'exclusion des autres mots ou expressionsayant le même sens.

Mais ce qui importe avant tout c'est de fixerle moule dans lequel il faudra couler la phrasefrançaise pour la rendre intelligible à nos tirailleursconnaissant quelques mots de notre langue.

Cette étude fera l'objet de notre premièrepartie.

PREMIÈRE PARTIE

I.—ARTICLE

Dans les dialectes de notre A. O. F., l'articlen'existe pas: pour désigner un objet, on en indiqueseulement le nom.

Exemple: falo signifiera en bambara, l'âne,un âne, âne.

Il n'y aura donc pas lieu dans les phrases d'employerd'articles. On remarquera même que nosgradés indigènes qui, au cours de théories defrançais, ont appris le nom des diverses partiesdu corps précédé de l'article, considèrent l'articleet le substantif comme formant un seul mot.

En montrant aux recrues la tête, ils dirontbien la tête, mais en voulant parler de leur tête,ils ne diront pas, ma tête ou mon tête, mais monlatête, ce qui prouve que pour eux le mot désignantcette partie du corps est non pas tête, maislatête.

Pour éviter donc toute complication, il est bonde supprimer purement et simplement l'articleen parlant aux tirailleurs.

II.—GENRE

Pas de genre pour les choses inanimées, considéronsque tout est du masculin (cela offre unintérêt pour l'emploi des adjectifs possessifs).

Exemple: mon case pour dire ma maison.

S'il s'agit d'un être animé, nous formerons leféminin en ajoutant au masculin le mot femme.Nous obtenons ainsi la forme usitée dans lesdialectes indigènes.

Exemple: Sô mou

...

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