A Pierre Villelard.
La sœur aînée du jeune Robert ayant épousé, au printemps, un grandindustriel de Paris, Robert devait naturellement être invité a passer lemois d'août dans la villa que son nouveau beau-frère possédait àFolleville-sur-Mer, plage à la mode.
—Il ne faut pas se dissimuler, toutefois, dit M. Carré de la Tour à safemme, que la présence de ton petit frère à la villa Mondésir n'est pasdépourvue de sérieux inconvénients!...
—Lesquels? demanda la jeune femme, stupéfaite.
—Robert à dix-sept ans et demi; il sort du collège: cela n'est rien.Mais songes-tu qu'il a été élevé à Grenoble, que sa famille est très«vieux jeu»...
—Dis donc! sa famille est la mienne. Eh! là!...
—Seulement, toi, tu es femme, et j'ai été près de toi pour t'apprendreà ne pas t'effaroucher, à ne pas t'emballer, enfin à connaître lesrègles du jeu nouveau...
—Tu crains le danger pour Robert?
—Pas du tout! Je crois Robert dangereux pour nous.
—Je la trouve bonne, par exemple! Un pauvre garçon à peine «dessalé»,comme vous dites, au milieu d'une bande de Parisiens déchaînés: et c'estlui qui constitue le danger?
—Tu verras si je me trompe.
Et le jeune Robert fit néanmoins le voyage de Grenoble à Folleville,pour s'installer, ivre de joie, à la villa Mondésir. Il avait été, commeses contemporains, fort privé d'agréments, ayant terminé ses étudespendant la guerre; et il crut, de bonne foi, en arrivant chez sonbeau-frère, que la paix du 28 juin le transportait, par un de ces effetsmerveilleux dont on ne s'étonne plus aujourd'hui, dans une planètetotalement différente de la vieille Terre où il avait appris à vivreselon des conventions aussi minutieuses que compliquées et tyranniques.
Il se trouva soudainement en contact avec une société qui semblait faiteexprès pour séduire un garçon de son âge. L'important