Le poète est ce pèlerin que Dieu envoie sur la terre pour qu'il y découvredes vestiges du Paradis perdu et du Ciel retrouvé.
Le poète est ce pauvre assis à midi sur le perron du vieux jardin où lepremier homme et la première femme furent si beaux. Il tient dans sa main sasébile, et, son chien à ses pieds, il demande aux passants distraits, et à Dieumême, l'aumône de la beauté qui fut, qui est et qui sera.
Mais les passants ne daignent point jeter les yeux sur lui, ils ne voient pasla douleur de ce regard. La seule créature qui ait compassion en silence est lechien immobile. . . . . Mais Dieu laisse choir dans la sébile du pauvre poètel'azur du ciel tout entier.
O Fra Angelico! tu te saisis alors de cet azur, tu l'exprimes sur ta toiletel qu'il t'est donné de l'apercevoir en cette heure inspirée qui rejointl'extase.
Et vous, mes frères, recevant aussi la faveur de ce ciel qui est tout entierà chacun, dans votre main tendue, vous en tissez votre tente, vous vous enenveloppez comme les vierges et comme les collines.
Et, tant est pure cette lueur divine que vous revêtez, qu'elle vous cache auxyeux des profanes. Ainsi la campanule d'Août, si blanche à force d'être bleue,semble s'évanouir.
Et le poète naît, passe et meurt comme la fleur des champs qu'à peine onremarque.
Le poète est celui qui observe, à travers la haute grille du parc, lescouples fondus au bleu de la nuit, et qui entend la grêle invitation desmandolines. Il n'est pas convié à la fête; mais le volubilis blanc des ténèbresfranchit la grille, se penche vers lui qui seul en découvre tout le miel ettoute la chaude neige. Et, tandis que les rumeurs amoureuses des belles couvrentle chant du rossignol, ce chant n'est perceptible qu'au poète dont le cœurs'emplit de la divine harmonie comme une source d'eau pure qui répond au chantde l'oiseau. Et j'entends Saint Jean de la Croix qui loue:
La nuit paisible,
La musique silencieuse,
La solitude harmonieuse,
Le souper qui charme et qui accroît l'amour,
Le bouquet de rosés en forme de pomme de pin. . .
. . . . L'aspiration du zéphyr,
Le chant de la douce Philomèle,
Le bois avec ses charmes durant la nuit sereine,
Avec la flamme qui consume et ne cause pas la douleur.
Le poète est celui qui n'ayant rien reçoit tout, qui renonce à sa coupegrossière pour boire à même le reflet frais du ciel, l'étudiant que chantait, ily a bien des siècles, dans un poème ineffable, Tchu-Kouang-hi:
Quand le soleil couchant cesse d'éclairer la fenêtre du nord-ouest
Alors que le vent d'automne dépouille en sifflant les bambous
L'étudiant s'approche de la fenêtre méridionale,
Car ses yeux ne quittent guère son livre, et toujours il est attentif.
Il songe a l'antiquité, en voyant la mousse et les grandes herbes;
Il regarde, il écoute, il jouit profondément de son calme et de sa solitude;
Peut-être demanderez-vous ce qu'il fait pour se procurer du moins sasubsistance:
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