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HISTOIRE
DE
FLANDRE
PAR
M. KERVYN DE LETTENHOVE
TOME PREMIER
1700 AV. J.-C.—1301 AP. J.-C.
BRUGES
BEYAERT-DEFOORT, ÉDITEUR
1874
Il est devenu aujourd'hui à peu près inutile d'insistersur l'importance des études historiques. Aux enseignementsd'une longue expérience qu'y cherchent les esprits sérieuxs'unit, pour les imaginations plus ardentes et plus vives,le charme d'un tableau dont les épisodes variés n'empruntentleurs couleurs et leur mouvement qu'à la vérité. Grandeurou décadence, prospérité ou misère, victoires oudésastres, tout y offre des leçons et des exemples, et tandisque les peuples parvenus au faîte de leurs destinéesaiment à jeter un regard en arrière sur le marais d'Evandrepour y découvrir leur modeste berceau,
Rara domorum
Tecta... quæ nunc romana potentia cœlo
Aequavit.
d'autres qui ont vu s'effacer leur influence et leur force sesentent encore plus irrésistiblement entraînés à recueillirleurs souvenirs et à entourer d'un culte pieux les ruines deleur puissance éteinte.
La Flandre a cette mission à remplir. Elle le doit auxgénérations qui l'élevèrent si haut qu'elle fut, pendant toutle moyen-âge, la métropole de l'industrie et le centre de lacivilisation. Les palmes des conquêtes lointaines immortalisèrent VIses princes et ses chevaliers plantant leurs bannièresà Jérusalem ou à Constantinople, et ses communesprésentèrent un spectacle non moins admirable en alliantau milieu des guerres les plus sanglantes l'héroïsme etl'abnégation du dévouement qui protége la patrie et legénie des arts utiles qui la rendent florissante.
Il faut surtout rechercher dans les annales de la Flandreles causes qui la maintinrent pendant longtemps à sonapogée et celles qui la précipitèrent tout à coup vers sachute. On ne saurait trop le remarquer: malgré les invasionsdu dehors et les luttes intérieures si fréquentes sousdes princes hostiles à la Flandre par leur naissance, leurambition et leurs intérêts, elle fut libre et forte tant queses institutions et ses mœurs, se soutenant mutuellementet entourées du même respect, restèrent également libreset fortes. Le jour où la corruption passa dans les mœurs,l'anarchie pénétra dans les institutions, et dès lors, condamnéeà perdre sa glorieuse individualité, il ne lui étaitréservé d'autre consolation que de se confondre, sous unemain qui ne lui était pas étrangère, dans le grand empirede Charles-Quint.
Cette appréciation des faits généraux de notre histoireest plus exacte que celle des écrivains qui, sans tenircompte de l'esprit propre à chaque siècle, ont voulu jugernos communes tantôt d'après les systèmes de l'antiquité,tantôt d'après des théories toutes modernes.
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