L'ILLUSTRATION
Prix du Numéro: 75 centimes.
SAMEDI 28 FÉVRIER 1891
49º Année--N° 2505




Le glacier de la Semoy (Ardennes): vue prise en aval desHautes-Rivières.


Tranchée ouverte dans les glaces pour déblayer la routedes Hautes-Rivières à Thilay.--Phot. Ronsin.



on Dieu, qu'il est curieux, ce Paris, où l'on peut, dans la mêmejournée, après avoir assisté à un service bouddhique le matin,rencontrer rue de Rivoli une impératrice d'Allemagne, et le soir, au balmilitaire, chercher parmi les uniformes la tunique blanche du cosaqueAchinoff!

Vraiment, c'est une ville unique. L'auberge du monde, a dit M. Malot. Lecabaret de l'Europe, a dit Mme de Metternich. Non, un musée plutôt, uneville heureuse et enviée dont rien, on le voit bien, ne peut détruire,ou du moins n'a encore détruit la supériorité.

On n'a pas assez souligné ce fait tragique et en quelque sorteshakespearien de la rencontre ou plutôt de l'arrivée dans la gare duNord, à quelques heures de distance, de celle qui fut l'impératrice enFrance et de celle qui fut l'impératrice d'Allemagne.

Des curieux attendent l'impératrice Frédéric. Un train arrive. Une femmeapparaît. C'est l'impératrice Eugénie. La veuve du vaincu de Sedanprécède la veuve du vainqueur de Frœschwiller. L'une et l'autredescendent sur le même quai, passent par la même porte. Vous aurez beauchercher, vous ne trouverez pas contraste et rapprochements plussaisissants que ceux-là. C'est de la tragédie en gare. Et tandis quel'impératrice Eugénie va chercher du soleil et du grand air àSan-Remo--où agonisa l'empereur Frédéric--l'impératrice allemande visitenos expositions de tableaux, rend visite à nos peintres, admire lespetits soldats de M. Detaille et les illustrations que prépare M. Dubufepour les œuvres d'Émile Augier. Elle jette un coup d'œil aux toiles deM. Munckacsy, et surtout elle flâne dans le jardin des Tuileries etdevant les boutiques. Curieuse comme une Anglaise, fine comme uneParisienne, très artiste, tout l'amuse et surtout l'article Paris quiest à la mode allemande ce qu'un sonnet bien ciselé est à un lourdpoème. Quelques-uns prétendent que le voyage de l'impératrice Frédéricn'est que la préface de l'arrivée de Guillaume II à Paris. Je n'insistepas là-dessus. Mais voilà bien de l'empressement et bien des politesses.Peut-être le jeune empereur a-t-il grande envie de venir applaudir lapetite Duhamel dans Miss Helyett comme l'a fait sa mère. Mais ce désirne serait pas sans m'inquiéter un peu. Chacun chez soi est une sageformule et un bon conseil.

La population parisienne accueille d'ailleurs la présence de la veuve del'empereur Frédéric avec la dignité et la courtoisie qui conviennent.C'est une femme, et c'est une souveraine dont les sentiments généreuxsont connus. Il y avait pour l'ataman Achinoff plus d'engouement àcraindre. Mais il n'a pas duré, cet engouement-là. J'écoutais la foulequi, samedi dernier, attendait devant l'Opéra illuminé l'arrivée del'ataman des cosaques libres.

On lui avait dit, à cette foule, qu'Achinoff assisterait au bal desofficiers, et elle voulait le voir.

Mais, tout en désirant satisfaire sa curiosité, elle tenait des proposassez narqu

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