SCÈNES

DE LA

VIE HOLLANDAISE

PAR

HILDEBRAND

—NICOLAS BEETS—

PARIS
MICHEL LÉVY FRÈRES, LIBRAIRES-ÉDITEURS
RUE VIVIENNE, 2 bis.
1856

Table


LA FAMILLE KEGGE


I

Une triste introduction.

Qui ne connaît, cette terrible maladie qu'on a coutume de désignerpar le nom redouté de fièvre nerveuse? Qui n'a vu succomber sous sonétreinte quelqu'un de ceux qui lui sont chers? Qui n'a assisté à cetteaffreuse lutte dans laquelle les nerfs et les vaisseaux se disputentl'avantage jusqu'à ce que le patient, le plus souvent, hélas! succombesous l'effort? Quant à moi, ce mal formidable me rappelle mainttriste souvenir. Je vois encore ces malades, les yeux éteints, leslèvres noircies, les mains desséchées comme du cuir, les doigts dansune perpétuelle agitation. Ils sont présents à mon esprit, tels queje les ai vus autrefois, plongés dans un morne et sinistre délire,silencieusement préoccupés de leurs visions, puis se relevant tout àcoup dans leur lit, avec une force qu'on ne leur eût plus soupçonnée,pour se tordre ensuite en proie à des angoisses où l'animal l'emportesur l'être intelligent. Je les vois encore dans cette fatale apathie,dans ces tristes intervalles de lucidité qui présagent la mortprochaine. Je vois encore ce lugubre appareil de sinapismes pourproduire un effet révulsif, ces couvertures mouillées destinées àempêcher le retour de la crise, cette brusque et saisissante transitiondes débilitants aux excitants. Je sens encore le camphre et le muscgui, d'ordinaire, épouvantent si fort les assistants. J'éprouve encorecette déchirante incertitude entre l'espérance et la crainte, cetteanxiété dans laquelle vous jette le commencement de chaque nuit, cetardent désir de voir reparaître le jour, de voir arriver le médecin.J'entends encore ceux qui tiennent de près au malade demander millefois si ce n'est pas la crise qui vient de se produire, nourrir lesdéplorables illusions qu'ils se créent eux-mêmes, en se félicitant designes qui leur semblent à eux de bon augure, en regardant le médecincomme un songe-creux, en interprétant ses paroles conformément à leursespérances,—et cela jusqu'à ce qu'enfin,—mais toujours sans qu'on s'yattende,—cette terrible vérité se confirme que la maladie ne laissepas d'espoir, que l'impitoyable mort s'est annoncée par des indicescertains.

Mais l'affreuse maladie, grâce à Dieu, éveille aussi en moi de douxsouvenirs de guérison; en moi qui ai personnellement lutté contre leredoutable mal avec l'énergique vigueur de la jeunesse, et qui en ai vud'autres, sauvés en quelque sorte du tombeau, revivre d'une vie épuréeet florissante. Je me rappelle ce rétablissement de la physionomie,ce sommeil calme et réparateur qui annonce peu à peu le retour de lasanté, ce premier réveil accompagné de la sensation délicieuse de laconvalescence et du repos goûté, cette calme expression des yeux silongtemps désirée, cette faim qui renaît, ce jour où l'on se lève pourla première fois, et cette enfantine reconnaissance que vous inspirele premier verre de vin qui vous est offert. Oh! la santé est uninestimable trésor, mais quand on se rétablit d'une maladie on savourede délicieuses jouissances!

Au commencement de la troisième année de mon séjour à Leyde, un jeunehomme, originaire de Démérary, était venu demeurer dans mon voisinage.C'est la coutume, en pareil cas, parmi les étudiants, de se rendrevisi

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